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Le gouvernement fédéral lance une consultation sur les recours visant les importations à bas prix

13 septembre 2021 Bulletin sur la réglementation Lecture de 7 min

Introduction

 Jusqu’au 26 septembre, les producteurs canadiens ont la rare occasion de donner leur point de vue sur des propositions de modification des lois sur les échanges commerciaux du Canada qui pourraient avoir une incidence importante sur leurs entreprises. Le gouvernement du Canada a invité les Canadiens à donner leur avis sur deux textes de loi qui sont fondamentaux pour le système de recours commerciaux du Canada : la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI) et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur (Loi sur le TCCE). Ces lois régissent les enquêtes sur les droits antidumping et compensatoires, le subventionnement et les mesures de sauvegarde, et établissent les règles en vertu desquelles le Canada peut imposer des droits sur les marchandises importées.

Le Canada sollicite les points de vue des intervenants dans cinq domaines : 1) l’amélioration de la participation des travailleurs syndiqués aux procédures de recours commerciaux; 2) les enquêtes sur le contournement des droits; 3) les importations massives; 4) les réexamens relatifs à l’expiration; et 5) l’amélioration de l’accès des PME au système de recours commerciaux du Canada. Examinons de plus près chacun de ces domaines et l’incidence que pourraient avoir les modifications proposées sur les producteurs canadiens.

1.  Participation des travailleurs syndiqués

 La première proposition concerne la participation des travailleurs syndiqués aux procédures de recours commerciaux. Même si les syndicats se sont vu accorder les pleins droits de participation à ces procédures en 2017, ils ne disposent toujours pas du droit de déposer des plaintes relatives aux recours commerciaux sous le régime de la LMSI ou de la Loi sur le TCCE. En outre, selon les lois actuelles, l’évaluation du dommage causé aux producteurs nationaux, une condition préalable à l’imposition de droits, ne tient pas compte des répercussions sur les travailleurs. Le Canada sollicite des points de vue sur l’opportunité d’accorder aux syndicats le droit explicite de déposer des plaintes relatives aux recours commerciaux et d’élargir les facteurs pris en compte dans la détermination du dommage pour inclure les répercussions des importations sur les travailleurs.

Étant donné qu’une partie importante de la main-d’œuvre canadienne continue d’être syndiquée, ces propositions, si elles sont adoptées, auront de vastes répercussions sur le droit des recours commerciaux au Canada. Les syndicats représentent des intérêts bien particuliers, et leur inclusion officielle dans les procédures des recours commerciaux faciliterait la prise en compte de ces intérêts. De même, l’élargissement de la notion de dommage pour inclure les répercussions sur les travailleurs serait une autre manière, pour le droit commercial canadien, de reconnaître les préoccupations des travailleurs. Cela procurerait également aux producteurs des arguments supplémentaires en faveur de l’imposition de recours commerciaux.

2.  Enquêtes sur le contournement des droits

Le Canada envisage aussi d’apporter des modifications aux enquêtes sur le contournement des droits, qui consistent à déterminer si un producteur étranger a modifié ses pratiques commerciales et d’affaires pour éviter les droits antidumping ou compensateurs. Le contournement peut se produire, par exemple, lorsqu’un producteur étranger expédie des pièces dans un pays tiers pour qu’elles y soient assemblées afin d’éviter les droits. Aux termes de la législation actuelle, une enquête anticontournement doit commencer par une plainte officielle, ce qui impose au plaignant le fardeau d’étayer ses allégations par des éléments de preuve.

Même si le contournement peut poser un sérieux problème aux producteurs nationaux, en pratique, il n’y a presque jamais d’enquêtes anticontournement, la procédure étant opaque et non éprouvée. C’est pour remédier à cette situation que le gouvernement consulte les parties intéressées afin de préciser la norme applicable à l’ouverture d’enquêtes anticontournement.

Comme le contournement permet aux producteurs étrangers de se soustraire aux droits qui leur sont imposés sous le régime de la législation canadienne, le redressement qu’offrent les recours commerciaux peut être miné si cette pratique de contournement est tolérée ou si ces recours sont tout simplement trop difficiles à exercer. Un processus plus transparent et plus clair pour l’ouverture de ces enquêtes apportera une plus grande certitude, réduira les risques qui y sont associés et favorisera le recours à ces enquêtes. En conséquence, les modifications proposées pourraient ajouter un outil efficace à l’arsenal des producteurs nationaux pour lutter contre le contournement.

3.   Importations massives

Le troisième axe des modifications proposées par le Canada est celui des importations massives. Les importations massives désignent la pratique consistant à augmenter les importations juste avant l’application de mesures provisoires (généralement des droits). Les producteurs étrangers cherchent ainsi à importer autant de marchandises que possible juste avant la date à laquelle les droits doivent s’appliquer. En d’autres termes, il s’agit d’un autre moyen pour éviter les recours commerciaux canadiens.

Pour contrer les importations massives, le TCCE peut appliquer rétroactivement des droits sur les marchandises importées au cours de la période précédant l’application de mesures provisoires. Il va sans dire que les données sur la quantité d’importations durant cette période sont cruciales. Or, en pratique, le TCCE ne recueille pas systématiquement ces données. Le Canada envisage donc d’exiger du TCCE qu’il recueille des renseignements sur les importations sur la période de 90 jours précédant l’ouverture d’une enquête.

De plus, en vertu de la LMSI, le TCCE ne peut appliquer de droits rétroactifs que s’il l’estime nécessaire pour prévenir la réapparition du dommage. Le Canada envisage d’introduire une norme plus souple selon laquelle les droits rétroactifs ne devraient être appliqués que lorsque des importations massives sont de nature à compromettre gravement l’effet correctif des droits.

Troisième défi lié aux importations massives : l’avis que l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) donne aux gouvernements étrangers avant d’ouvrir une enquête sur le subventionnement. En raison du calendrier des procédures de l’ASFC, les gouvernements étrangers disposent généralement d’un délai de 30 jours entre la date de l’avis et l’ouverture d’une enquête ce qui permet aux producteurs étrangers d’exporter de grandes quantités de marchandises avant l’imposition des droits associés à la période d’enquête. Le gouvernement souhaite recueillir des points de vue sur l’opportunité de ramener ce délai à 20 jours pour les enquêtes sur le subventionnement et à 7 jours pour celles sur le dumping.

Les importations massives, dont l’objectif est d’échapper aux recours commerciaux dûment imposés, sont susceptibles de fausser le marché canadien au détriment des producteurs canadiens. Parce qu’ils sont censés contrer ce phénomène, les droits rétroactifs sont une caractéristique importante d’un régime de recours commerciaux efficace. La collecte obligatoire de données faciliterait probablement la prise de décisions transparentes en la matière. De même, une norme plus souple pourrait réduire les obstacles à l’obtention d’une conclusion d’importation massive, ce qui aurait des retombées positives pour les producteurs canadiens. La réduction de la période d’avis à 20 jours est également un pas dans la bonne direction, car elle raccourcit la période durant laquelle un afflux d’importations est susceptible de se produire.

4.    Réexamens relatifs à l’expiration

Le prochain domaine couvert par la consultation est le réexamen relatif à l’expiration. Les ordonnances relatives aux droits antidumping et compensateurs sont valables pendant cinq ans, après quoi elles expirent ou sont prorogées. Le TCCE a pour pratique d’inviter les parties intéressées à formuler des commentaires jusqu’à la fin de la période de cinq ans et, en fonction de ces commentaires, de décider si un réexamen relatif à l’expiration est justifié. En d’autres termes, la balle est dans le camp des producteurs nationaux qui veulent empêcher l’expiration des ordonnances de recours commerciaux. Au lieu de ce processus, le Canada envisage de demander au TCCE de procéder automatiquement aux réexamens relatifs à l’expiration. La proposition permettrait également au TCCE de mettre fin au réexamen relatif à l’expiration s’il est évident qu’il n’y a pas d’appui du secteur de production nationale pour le réexamen.

Tant pour les producteurs nationaux que pour le TCCE, des réexamens relatifs à l’expiration automatiques simplifieraient le processus se déroulant vers la fin de la période de cinq ans d’une ordonnance de recours commercial. De plus, ces modifications profiteraient aux producteurs nationaux en éliminant un autre obstacle formel à l’imposition de droits au-delà de la période de cinq ans.

5.  Améliorer l’accès des PME au système de recours commerciaux du Canada

Le dernier domaine où le Canada envisage des modifications est celui des petites et moyennes entreprises (PME). Le droit commercial international reconnaît qu’il peut être difficile pour les PME (définies au Canada comme des producteurs comptant moins de 500 salariés) de fournir les renseignements demandés par les autorités chargées des enquêtes dans le cadre de procédures relatives aux recours commerciaux. En 2003, l’ASFC a créé une « unité virtuelle » afin d’aider les PME à recueillir des renseignements et à déposer des plaintes. Toutefois, cette unité a eu un rôle relativement limité. Par exemple, elle n’aide pas les PME au cours des étapes du processus d’enquête ou d’examen, mais seulement avant le dépôt d’une plainte.

Afin de mieux répondre aux difficultés rencontrées par les PME dans les méandres du système canadien de recours commerciaux, le Canada envisage de créer une unité indépendante dédiée à la prestation de conseils en recours commerciaux qui offrirait une aide gratuite aux entreprises touchées par des importations ou des droits afférents aux recours commerciaux. Cette unité aiderait les entreprises à préparer les plaintes et autres demandes, requêtes et déclarations. Le Canada sollicite des points de vue sur le genre de services, de renseignements et de ressources que les producteurs trouveraient utiles, et sur la question de savoir si ces services devraient être fournis aux producteurs nationaux et étrangers, et aux PME uniquement ou à toutes les entreprises.

Les modifications proposées en ce qui concerne les PME sont peut-être celles qui offrent les possibilités les plus avantageuses pour les producteurs canadiens. Étant donné la complexité du système de recours commerciaux, nombreuses sont les PME qui peinent à s’y retrouver, malgré les avantages potentiels de ces recours. Selon le genre et la qualité des services qu’elle offre, une unité de conseil indépendante pourrait améliorer considérablement les résultats pour les PME en facilitant l’accès au processus et en rendant celui-ci plus compréhensible et prévisible.

Conclusion

La consultation en cours sur les modifications de la LMSI et de la Loi sur le TCCE est une occasion relativement rare pour les producteurs canadiens d’exprimer leurs points de vue sur un certain nombre d’aspects clés du système de recours commerciaux du Canada. Par ces modifications, le gouvernement vise à élargir l’accès au processus de recours commerciaux, à offrir, en particulier aux PME, un soutien technique supplémentaire, et à améliorer l’efficacité des recours commerciaux eux-mêmes. Chacun de ces aspects peut avoir une incidence importante sur les producteurs canadiens. En effet, dans la mesure où leur participation à la consultation donne aux producteurs la possibilité d’influer sur les modifications proposées à la législation canadienne sur les recours commerciaux, tous les producteurs devraient envisager d’y participer.

par Peter Jarosz et Philip Kariam

Mise en garde

Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt consulter ses propres conseillers juridiques.

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