Commentaires de l’ACFC sur le système bancaire ouvert : trouver le juste équilibre pour assurer la protection des consommateurs et la participation générale du secteur financier
Commentaires de l’ACFC sur le système bancaire ouvert : trouver le juste équilibre pour assurer la protection des consommateurs et la participation générale du secteur financier
Le 1er mars 2021, l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (l’« ACFC ») a soumis des commentaires au Comité consultatif sur un système bancaire ouvert (le « Comité ») aux fins d’examen dans le cadre du processus de consultation sur le système bancaire ouvert (aussi appelé finances axées sur les clients) entrepris par le Comité. Les recommandations de l’ACFC visent la mise en oeuvre d’une approche équilibrée du système bancaire ouvert au Canada qui accorde la priorité à la protection des consommateurs et qui établit clairement les rôles des participants de l’industrie et du gouvernement.
Protection des consommateurs
L’ACFC est un organisme fédéral de réglementation du secteur financier chargé, entre autres choses, de surveiller la conformité des entités financières sous réglementation fédérale à l’égard des mesures de protection des consommateurs. Bon nombre de ses recommandations pour un système bancaire ouvert mettent l’accent sur le droit des consommateurs de contrôler leurs données financières, d’avoir accès à une vaste gamme de services et de produits financiers et d’obtenir des solutions aux problèmes pouvant survenir. L’ACFC affirme que « la protection des consommateurs doit être intégrée à chaque étape de l’accréditation et de la mise en œuvre, ainsi que de la gouvernance et de la maintenance de tout système bancaire ouvert ».
L’ACFC recommande en particulier que les participants au système bancaire ouvert soient tenus de respecter certains critères d’accréditation, notamment des exigences de protection des consommateurs et d’inclusion financière juridiquement contraignantes. Ces exigences permettraient d’assurer que : (i) les consommateurs ont un accès équitable et fiable aux services et aux produits financiers; (ii) les entités financières ont mis en place des normes appropriées en matière de sécurité, de protection des données et de protection des renseignements personnels; et (iii) les entités financières ont la capacité d’indemniser les consommateurs pour les pertes potentielles.
La responsabilisation est un autre point sur lequel l’ACFC insiste dans sa présentation. L’ACFC recommande l’application d’un cadre de responsabilité convivial et efficace qui attribue la responsabilité au sein du système et qui ne l’impose pas au consommateur. Mentionnons notamment la mise sur pied d’un organisme externe unique de traitement des plaintes doté d’un pouvoir contraignant qui serait chargé de statuer sur les activités du système bancaire ouvert. L’ACFC cite le système de gestion des conflits mis sur pied par l’entité de mise en œuvre du système bancaire ouvert du Royaume‑Uni comme exemple dont le Comité pourrait s’inspirer.
L’éducation et le consentement des consommateurs sont deux autres éléments clés des commentaires de l’ACFC. L’éducation améliorera la conscience qu’ont les consommateurs des avantages et des risques du système bancaire ouvert. Plus précisément, l’ACFC recommande que le Comité établisse un fonds commun pour l’éducation des consommateurs ainsi qu’une autorité de confiance chargée de superviser les programmes et le matériel éducatifs. En revanche, le consentement permet aux consommateurs de garder le contrôle des renseignements financiers les concernant. L’ACFC insiste sur le fait que le consentement doit être explicite, surtout dans les cas où les données des consommateurs sont transférées entre des participants à un système bancaire ouvert, et qu’il ne doit pas être lié à l’offre d’un produit ou à la prestation d’un service.
Les propositions ci‑dessus visent à rehausser la confiance des consommateurs, ce que l’ACFC considère comme essentiel au succès du système bancaire ouvert au Canada. L’ACFC est d’avis que le gouvernement, en particulier, peut jouer un rôle clé dans la promotion de cette confiance.
Participation du gouvernement
Le Comité envisage actuellement un « modèle hybride de système bancaire ouvert qui n’est ni entièrement dirigé par l’industrie ni par le gouvernement ». L’ACFC propose que le Comité tire parti des connaissances et de l’expérience des organismes existants de réglementation du secteur financier. En raison de leur expérience dans l’élaboration de normes de marché et la réglementation des pratiques commerciales, les organismes de réglementation sont bien placés pour atténuer les risques et établir des pratiques exemplaires.
L’ACFC suggère que le gouvernement s’acquitte des fonctions suivantes :
- contribuer à l’établissement de critères d’accréditation appropriés pour s’assurer que la protection des consommateurs est une priorité;
- fournir des renseignements impartiaux sur les produits et services financiers et assurer la coordination avec les entités financières afin de fournir aux consommateurs les renseignements dont ils ont besoin pour prendre des décisions éclairées au sein du système bancaire ouvert;
- établir des normes en matière de pratiques commerciales, de plaintes et de responsabilité (normes qui, selon l’ACFC, devraient être définies par les organismes de réglementation fédéraux et provinciaux pertinents et non par un organisme dirigé par l’industrie).
À tout le moins, l’ACFC est d’avis que les participants au système bancaire ouvert devraient être tenus de respecter les normes fédérales actuelles en matière de pratiques commerciales. Toutefois, l’ACFC reconnaît qu’un large éventail d’entités financières participeront au système (ou du moins, tenteront de le faire). Afin d’encourager une vaste participation, l’ACFC recommande que le Comité envisage dans certains cas une conformité substitutive pour aider à gérer le fardeau réglementaire et à uniformiser les règles du jeu.
Questions nécessitant un examen plus approfondi
Bien que la présentation de l’ACFC comporte plusieurs propositions que le Comité devra examiner, elle définit aussi des problèmes potentiels que le Comité pourrait explorer plus à fond au cours de son processus de consultation.
Les limites des compétences et les contraintes législatives posent un défi pour l’établissement d’une norme unique et unifiée pour le système bancaire ouvert au Canada. L’ACFC reconnaît en particulier que les organismes de réglementation existants du secteur financier surveillent actuellement divers participants et s’occuperont probablement de traiter les plaintes des consommateurs au sujet du système bancaire ouvert.
Par conséquent, il faudra envisager de définir clairement le rôle et la portée de l’autorité des organismes de réglementation et l’ampleur de leur participation au système bancaire ouvert.
Il est également important de trouver le juste équilibre entre les organismes d’accréditation et de mise en œuvre proposés. L’ACFC reconnaît qu’un organisme d’accréditation dirigé par l’industrie pourrait être mieux placé pour décider des normes techniques et des pratiques de gouvernance pour les entités financières, mais cet organisme devrait tout de même être assujetti à la surveillance du gouvernement afin de réduire le risque qu’il devienne « un groupe de l’industrie plutôt qu’un organisme public ». De même, l’ACFC exhorte le Comité à examiner la façon dont les organismes provinciaux et fédéraux de réglementation du secteur financier et les organismes gouvernementaux interagiront avec l’organisme de mise en œuvre, surtout si ce dernier est chargé d’établir les règles pour les entités financières qui participent au système bancaire ouvert.
En somme, l’ACFC appuie le modèle hybride proposé pour un système bancaire ouvert au Canada, dans la mesure où l’on y retrouve un équilibre entre l’industrie et le gouvernement.
Reconnaissant qu’il faudra peut‑être encore un certain temps pour élaborer un cadre complet, l’ACFC recommande qu’une orientation immédiate soit fournie, qui comprendrait une date d’échéance pour le grattage d’écran (que le système bancaire ouvert remplacera). Le grattage d’écran oblige les consommateurs à partager leurs justificatifs d’ouverture de session avec une application tierce qui ouvre ensuite une session dans le compte du consommateur pour obtenir des renseignements financiers. Il y a bien sûr toute une série de préoccupations en matière de responsabilité et de protection de la vie privée liées à l’utilisation du grattage d’écran. Quoi qu’il en soit, ce dernier est actuellement utilisé dans le cadre du processus de demande de certains produits de services financiers et de la surveillance des données financières comme condition d’utilisation continue de ces produits.
Il y aura des défis et des décisions difficiles à prendre; toutefois, il vaut la peine de les surmonter afin de mettre en œuvre un système bancaire ouvert sécurisé pour les Canadiens qui permet la participation d’un large éventail d’entités du secteur financier.
par Darcy Ammerman et Courteney Rickert (étudiante en droit)
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
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