Les canadiens connaissent peu le système bancaire ouvert : est-ce un problème?
Les canadiens connaissent peu le système bancaire ouvert : est-ce un problème?
Selon l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (l’« ACFC »), les Canadiens ont une faible compréhension du système bancaire ouvert. Le 1er juin dernier, l’ACFC a publié les résultats de son sondage sur la sensibilisation et la compréhension des Canadiens à l’égard du système bancaire ouvert et des services de technologie financière (les « entreprises de technologie financière »), sondage qu’elle a réalisé entre mai et juin 2022, dans le cadre de son mandat visant à évaluer les tendances et les enjeux émergents du secteur financier pouvant avoir une incidence sur les consommateurs. Ce sondage s’inscrit également dans l’objectif global du gouvernement fédéral d’implanter le système bancaire ouvert au pays d’une façon qui avantage et protège les consommateurs.
Qu’est-ce qu’un système bancaire ouvert?
Le système bancaire ouvert permet l’échange sécuritaire des données financières des consommateurs entre leur banque et une autre institution financière ou entreprise de technologie financière accréditée. Ce sont les consommateurs qui donnent la permission de partager leurs données financières avec les entreprises qui offrent des applications et des services financiers. Ces dernières peuvent ensuite utiliser les données pour offrir des services personnalisés (comme des conseils ou des prêts). Les consommateurs peuvent retirer leur consentement au partage de leurs renseignements à tout moment.
Résultats du sondage
La sensibilisation et la compréhension des Canadiens à l’égard du système bancaire ouvert sont très faibles : seulement 9 % des personnes sondées en avaient entendu parler. La faible minorité de personnes qui se sont dites familières avec le concept ont dû répondre à des questions « vrai ou faux » pour valider leurs connaissances. Bon nombre d’entre elles n’ont pas pu répondre correctement, ce qui signifie que les personnes qui comprennent réellement le concept sont encore moins nombreuses.
Le système bancaire ouvert :
- signifie que les Canadiens peuvent dire à leurs banques de partager leurs données bancaires avec d’autres entreprises (vrai – 62 % des répondants ont répondu correctement);
- existe au Canada aujourd’hui (faux – 21 % des répondants ont répondu correctement);
- signifie que les banques doivent échanger des renseignements sur les victimes de fraude entre elles (faux – 30 % des répondants ont répondu correctement);
- signifie que le gouvernement canadien a accès aux renseignements financiers de tous les Canadiens (faux – 44 % des répondants ont répondu correctement).
Compte tenu de cette mince connaissance du concept, il n’est pas surprenant de constater que l’intérêt des consommateurs pour l’utilisation d’un système bancaire ouvert est également faible. Après avoir lu une définition du système bancaire ouvert, 52 % des Canadiens ont indiqué qu’ils ne l’utiliseraient pas, 29 % ont répondu « peut-être » et seulement 15 % ont mentionné qu’ils y participeraient.
Selon les résultats, la présence de mesures de protection des consommateurs favoriserait la participation des Canadiens au système bancaire ouvert. Les protections les plus populaires étaient « une protection complète contre toute perte » (70 %), « la capacité de révoquer le consentement à tout moment » (63 %), « l’obligation de signaler les atteintes à la protection des données exposant les données des consommateurs » (63 %) et « l’application des exigences de sécurité standard pour les participants au service bancaire ouvert » (62 %).
Interprétation des résultats
Même si les résultats ont été publiés seulement récemment, il est important de garder en tête que le sondage a été réalisé il y a plus d’un an. Comme le système bancaire ouvert a été abordé il y a peu de temps dans les médias, il y a fort à parier que les consommateurs connaissent beaucoup mieux le concept que l’année dernière. Au moment du sondage, le responsable du système bancaire ouvert était en poste depuis seulement quelques mois, et les groupes de travail sur la question venaient tout juste d’être créés. Depuis, ces groupes se sont réunis plusieurs fois (voir notre bulletin sur leurs activités ici).
De plus, les consommateurs n’ont pas besoin de connaître la définition de système bancaire ouvert ou de comprendre les subtilités de son fonctionnement pour en tirer parti. Au même titre qu’il n’est pas nécessaire de connaître toutes les étapes d’un transfert télégraphique pour comprendre à quel point c’est utile. C’est l’utilisation du système bancaire ouvert qui sera avantageuse pour les consommateurs, et non la compréhension du concept.
Selon le sondage, la popularité du système bancaire ouvert pourrait dépendre des mesures de protection des consommateurs intégrées au cadre régissant le système. En effet, les consommateurs seront plus susceptibles d’adopter le système s’ils disposent d’un meilleur contrôle sur leurs données, qu’il s’agisse de la possibilité de retirer leur consentement au partage de données ou d’avoir des recours à leur disposition lorsque leurs intérêts sont lésés. Ils ne rejetteront pas nécessairement le système bancaire ouvert complètement : ils veulent simplement être certains que leurs intérêts sont protégés s’ils participent à un tel système ou font affaire avec des entreprises de technologie financière.
Au Royaume-Uni et en Australie, où le système bancaire ouvert est déjà bien implanté, le gouvernement a exhorté les banques à transmettre des messages cohérents aux consommateurs. Par exemple, le Royaume-Uni a établi diverses normes et lignes directrices, dont les directives sur l’expérience client, sur lesquelles les banques peuvent s’appuyer pour mettre en œuvre et exploiter un système bancaire ouvert. Ces lignes directrices ne se veulent pas un outil d’information sur le système bancaire ouvert et ses subtilités, mais plutôt une ressource qui met l’accent sur le consentement éclairé du consommateur, la protection des données et la conception d’interface.
L’objectif est de s’assurer que les consommateurs se sentent bien informés, en contrôle de leurs données et protégés.
Les prochaines étapes
Un peu comme ailleurs dans le monde, il faudra miser sur l’éducation pour favoriser la participation des consommateurs. Dans ses commentaires soumis en 2021 au Comité consultatif sur un système bancaire ouvert, l’ACFC recommande de fournir des informations claires, simples et n’induisant pas en erreur sur les avantages et les risques ainsi que de l’information importante pour favoriser la compréhension des consommateurs et des résultats positifs pour eux. L’industrie peut fournir des documents d’information, mais elle recommande un mécanisme pour financer l’éducation des consommateurs supervisé par une « autorité de confiance ». Elle se dit également bien positionnée pour contribuer à l’élaboration et à la communication de messages aux Canadiens.
Il sera intéressant de voir quel modèle de programme informatif adoptera le gouvernement du Canada. Si nous emboitons le pas à ce qui se fait ailleurs dans le monde, le modèle canadien incitera les banques à faire connaître les avantages du système bancaire ouvert aux consommateurs, même si cette façon de faire augmente la concurrence entre les fournisseurs de services financiers. Les institutions financières pourraient devoir entreprendre un virage conceptuel et considérer désormais que les données financières appartiennent aux consommateurs, comme le font d’autre pays, pour ainsi favoriser une transition tout en douceur.
Lors du Sommet de Paiements Canada en mai, le responsable du système bancaire ouvert a annoncé qu’un cadre canadien régissant le système bancaire ouvert serait présenté d’ici la fin de l’année.
par Darcy Ammerman, Robbie Grant, Pat Forgione, Robert Piasentin, Isabelle Guevara et Nicole Davidson (étudiante d’été)
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
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