Budget 2023 : incitatifs pour les énergies propres et mesures pour le secteur des ressources
Budget 2023 : incitatifs pour les énergies propres et mesures pour le secteur des ressources
Le budget 2023, dévoilé par le gouvernement fédéral le 28 mars 2023 (le « jour du budget »), contient plusieurs mesures conçues pour faciliter le virage vers la carboneutralité. En effet, il prévoit divers crédits d’impôt pour la conception, la fabrication et la transformation de technologies propres; étend à de nouveaux minéraux critiques les déductions et les crédits d’impôt à l’investissement dans les ressources; et prolonge la disponibilité de taux d’imposition réduits pour les fabricants de technologies à zéro émission. Voici un résumé des différentes mesures.
Crédit d’impôt à l’investissement dans l’hydrogène propre
Le gouvernement fédéral avait manifesté son intention d’instaurer un crédit d’impôt pour la production d’hydrogène propre dans le budget 2022. Dans l’Énoncé économique de l’automne de 2022 (l’« Énoncé 2022 »), le gouvernement avait annoncé le lancement d’un processus de consultation sur la meilleure façon de mettre en œuvre un crédit d’impôt remboursable pour l’hydrogène propre s’appuyant sur l’intensité carbonique de l’hydrogène produit par un projet donné au cours de son cycle de vie.
Le budget 2023 établit le crédit d’impôt à l’investissement dans l’hydrogène propre (le « crédit d’impôt pour l’hydrogène »), un crédit d’impôt remboursable pour l’achat et l’installation d’équipement admissible pour des projets de production d’hydrogène :
- par électrolyse;
- issu de gaz naturel, pourvu que les émissions soient réduites grâce au captage, à l’utilisation et au stockage du carbone (CUSC).
Le taux du crédit d’impôt pour l’hydrogène dépend du niveau d’intensité carbonique (IC) de l’hydrogène produit. Ce niveau est calculé selon le Modèle d’analyse du cycle de vie des combustibles d’Environnement et Changement climatique Canada, puis transmis au gouvernement pour vérification. L’IC est mesurée en kilogrammes d’équivalent dioxyde de carbone par kilogramme d’hydrogène produit. Le tableau suivant illustre l’effet de l’IC sur le taux du crédit d’impôt pour l’hydrogène
IC (en kg d’équivalent CO2 par kg d’hydrogène) | Taux du CI pour l’hydrogène |
<0,75 kg | 40 % |
0,75 kg à <2 kg | 25 % |
2 kg à <4 kg | 15 % |
Le crédit d’impôt pour l’hydrogène s’applique à l’équipement admissible qui est acquis et prêt à être mis en service au Canada à compter du jour du budget. Il sera réduit de moitié pour le matériel acquis et prêt à être mis en service en 2034, puis éliminé après 2034. Pour être admissible, l’équipement doit être utilisé exclusivement ou presque pour la production d’hydrogène par électrolyse ou issu de gaz naturel. Dans le cas du gaz naturel, seul l’équipement non admissible au crédit CUSC (voir ci-après) serait admissible.
Pour recevoir le taux maximum (selon l’IC) du crédit d’impôt pour l’hydrogène, le projet doit respecter certaines exigences relatives à la main-d’œuvre, sans quoi le taux applicable sera réduit de 10 points de pourcentage. Ces exigences sont détaillées ci-après.
Crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres
Le budget 2023 vient élargir l’admissibilité au crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres (le « crédit d’impôt pour les technologies ») annoncé d’abord dans l’Énoncé 2022, dont les détails sont précisés.
Le crédit d’impôt pour les technologies est un crédit d’impôt remboursable équivalant à 30 % du coût du matériel admissible qui est acquis et prêt à être mis en service à compter du jour du budget et avant 2035. Le taux chutera à 15 % en 2034, puis le crédit sera éliminé en 2035.
L’Énoncé 2022 comprenait une liste de matériel admissible au crédit d’impôt pour les technologies :
- les systèmes de production d’électricité, y compris l’énergie solaire photovoltaïque, les petits réacteurs nucléaires modulaires, l’énergie solaire concentrée, l’énergie éolienne et l’énergie hydraulique (petite centrale hydroélectrique, courant de rivière, vague et marée);
- les systèmes fixes de stockage de l’électricité exploités sans combustibles fossiles, ce qui comprend entre autres les batteries, les volants d’inertie, les supercondensateurs, le stockage d’énergie magnétique, le stockage d’énergie provenant d’air comprimé, le stockage d’énergie hydroélectrique par pompage, le stockage d’énergie par gravité et le stockage d’énergie thermique;
- le matériel de chauffage à faibles émissions de carbone, y compris le matériel de chauffage solaire actif, les thermopompes à air et les thermopompes géothermiques;
- les véhicules industriels zéro émission et le matériel connexe de recharge et de ravitaillement, par exemple l’équipement lourd à hydrogène ou électrique utilisé dans l’exploitation minière ou la construction.
Le budget 2023 vient ajouter le matériel décrit au sous-alinéa d)(vii) de la catégorie 43.1, utilisé principalement pour produire de l’énergie électrique ou de l’énergie thermique, ou les deux, uniquement à partir d’énergie géothermique. Cet ajout vise notamment la tuyauterie, les pompes, les échangeurs thermiques, les séparateurs de vapeur et le matériel générateur d’électricité. Attention : le crédit d’impôt pour les technologies ne s’applique pas au matériel utilisé pour des projets produisant à la fois de l’énergie géothermique et de l’énergie fossile.
Comme le crédit d’impôt pour l’hydrogène, le crédit d’impôt pour les technologies prévoit certaines exigences relatives à la main-d’œuvre (détaillées ci-après) pour l’admissibilité au taux maximal. En cas de non-respect, le taux est réduit à 20 % (10 % en 2034).
Crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre
Le budget 2023 prévoit un nouveau crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre (le « crédit d’impôt pour l’électricité »), un crédit d’impôt remboursable de 15 % pour les investissements admissibles dans :
- les systèmes de production d’électricité sans émissions, de sources éoliennes, solaires concentrées, solaires photovoltaïques, hydroélectriques (y compris à grande échelle), marémotrices et nucléaires (y compris les réacteurs modulaires à petite ou grande échelle);
- la production d’électricité au gaz naturel réduite (qui serait soumise à un seuil d’intensité des émissions compatible avec un réseau carboneutre d’ici 2035);
- les systèmes fixes de stockage de l’électricité exploités sans combustibles fossiles, comme les batteries, le stockage d’énergie hydroélectrique par pompage et le stockage d’air comprimé;
- l’équipement pour le transport de l’électricité entre les provinces et les territoires.
Le crédit d’impôt pour l’électricité devrait entrer en vigueur le jour du budget 2024 pour les projets dont la construction n’était pas amorcée avant le jour du budget 2023. Il devrait être offert jusqu’en 2034; les documents budgétaires ne prévoient aucune élimination progressive.
Pour avoir droit au taux maximal, il faudra satisfaire à certaines exigences en matière de main-d’œuvre, qui seront établies au terme de consultations entre le gouvernement, les syndicats et d’autres intervenants. En cas de non-respect, le taux serait réduit à 5 %.
L’accès au crédit d’impôt est également conditionnel à ce qu’une autorité compétente s’engage à ce que les fonds servent à réduire le montant des factures d’électricité, et à contribuer à rendre le secteur de l’électricité carboneutre d’ici 2035. Ces engagements et les exigences applicables devraient se préciser lorsque le gouvernement fédéral aura consulté les gouvernements provinciaux et territoriaux.
Exigences relatives à la main-d’œuvre
Pour que son projet soit admissible au taux maximal des crédits d’impôt pour l’hydrogène, les technologies et l’électricité, le bénéficiaire devra satisfaire, à compter du 1er octobre 2023, à certaines exigences en matière de salaire et d’apprentissage. Ces exigences s’appliquent aux travailleurs (salariés ou autonomes) qui effectuent principalement du travail manuel ou physique; le personnel administratif, le personnel de bureau, les superviseurs et les cadres sont exclus.
Les travailleurs du projet devront recevoir minimalement le « salaire en vigueur » (y compris la valeur pécuniaire des prestations et des cotisations de retraite) prévu dans une convention collective admissible. Au Québec, une telle convention serait négociée conformément au droit provincial. Dans les autres provinces et les territoires, la convention collective admissible serait la plus récente convention collective multi-employeurs (entre un syndicat et un groupe d’employeurs) pouvant raisonnablement être considérée comme la norme du secteur pour un métier donné dans la région, la province ou le territoire concerné.
En outre, sous réserve des lois du travail et des conventions collectives applicables, au moins 10 % des heures travaillées par les gens de métier doivent être effectuées par des apprentis inscrits. Le terme « gens de métier » renvoie aux personnes qui exercent un métier désigné Sceau rouge.
Crédit d’impôt à l’investissement dans la fabrication de technologies propres
Le budget 2023 prévoit également un nouveau crédit d’impôt remboursable de 30 % pour la fabrication et la transformation de technologies propres ainsi que l’extraction et la transformation de minéraux critiques (le « crédit d’impôt pour la fabrication »). Ce crédit d’impôt s’appliquerait au coût des investissements relatifs à l’équipement admissible utilisé pour certaines activités de fabrication, et d’extraction ou de transformation de minéraux.
Il couvrirait notamment certains biens amortissables utilisés exclusivement ou presque pour des activités admissibles. En général, les biens admissibles comprendraient les machines et le matériel utilisés dans la fabrication, la transformation ou l’extraction de minéraux critiques, ainsi que les systèmes de contrôle connexes.
Les activités admissibles au crédit d’impôt pour la fabrication seraient :
- la fabrication de certains matériaux liés à l’énergie renouvelable (solaire, éolienne, hydraulique ou géothermique) et à l’énergie nucléaire; la transformation ou le recyclage de combustibles nucléaires et d’eau lourde;
- la fabrication de barres de combustible nucléaire;
- la fabrication de matériel de stockage de l’énergie électrique utilisé pour fournir du stockage à l’échelle du réseau ou d’autres services auxiliaires;
- la fabrication de matériel pour les systèmes de thermopompe à air et de pompe géothermique;
- la fabrication de véhicules zéro émission, y compris la conversion de véhicules routiers; la fabrication de batteries, de piles à combustible, de systèmes de recharge et de postes de ravitaillement en hydrogène pour les véhicules zéro émission;
- la fabrication de matériel utilisé pour produire de l’hydrogène par électrolyse;
- la fabrication ou la transformation de composants en amont, de sous-ensembles et de matériaux, à condition que la production soit conçue à une fin particulière ou exclusivement pour faire partie intégrante d’autres activités de fabrication ou de transformation de technologies propres admissibles, comme les matériaux anodiques et cathodiques utilisés pour les batteries de véhicules électriques;
- l’extraction de lithium, de cobalt, de nickel, de graphite, de cuivre et d’éléments de terres rares, ainsi que certaines activités de transformation.
CUSC
Le budget 2023 prévoit plusieurs ajouts au crédit d’impôt à l’investissement dans le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (le « crédit d’impôt CUSC ») présenté dans le budget 2022.
Sera désormais admissible au crédit CUSC l’équipement à double usage qui produit de la chaleur ou de l’électricité – ou qui utilise de l’eau – aux fins de captage, d’utilisation et de stockage du carbone (CUSC), mais aussi pour un autre procédé (pourvu que l’équipement respecte toutes les autres conditions du crédit d’impôt CUSC). Pour être admissible, l’équipement à double usage qui produit de la chaleur ou de l’électricité devra permettre le captage, le stockage ou l’utilisation des émissions de CO2, et servir principalement soit au processus de CUSC, soit à la production d’hydrogène admissible au crédit d’impôt pour l’hydrogène.
Le crédit d’impôt CUSC applicable à l’équipement à double usage serait proportionnel au taux attendu d’utilisation de l’énergie ou des matériaux dans le processus de CUSC pendant les 20 premières années du projet.
D’autres changements sont présentés, notamment :
- l’ajout de la Colombie-Britannique à la liste de territoires admissibles au stockage géologique dédié;
- la possibilité de recouvrer certains frais de remise en état de biens dans les 20 années suivant immédiatement le début de la phase d’exploitation;
- l’obligation de faire valider le procédé d’utilisation et de stockage du CO2 par un tiers compétent (au lieu de le faire approuver par Environnement et Changement climatique Canada) pour établir son admissibilité au crédit CUSC.
Enfin, les documents du budget 2023 comprennent un projet de dispositions législatives sur l’échange de connaissances et la divulgation des risques climatiques aux fins du crédit d’impôt CUSC. En résumé :
- Un rapport sur l’échange de connaissances de la construction et la réalisation, contenant les renseignements visés par le ministre des Ressources naturelles, devra être produit dans les six mois suivant le début des activités commerciales;
- Cinq rapports annuels sur l’échange de connaissances d’exploitation, contenant les renseignements visés par le ministre des Ressources naturelles, devront être produits. Le premier rapport annuel doit être produit au plus tard : a) le 30 juin de l’année civile suivante si les activités commerciales commencent avant le 1eroctobre; b) le 30 juin de la seconde année civile subséquente si les activités commerciales commencent le 1er octobre ou après cette date. La date d’échéance des rapports subséquents est le 30 juin;
- Un rapport sur la divulgation des risques climatiques, contenant les renseignements visés par le Règlement de l’impôt sur le revenu, doit être produit annuellement pendant les 20 années suivant le début des activités commerciales. Le premier rapport doit être produit dans les neuf mois suivant la fin de la première année d’imposition au cours de laquelle le contribuable déduit le crédit d’impôt CUSC. Les rapports subséquents doivent être produits dans les neuf mois suivant la fin de l’année d’imposition du contribuable.
Cas d’admissibilité à plusieurs crédits d’impôt
Vu la nature des critères d’admissibilité aux différents crédits d’impôt, un même bien ou une même machine pourrait être admissible à plusieurs crédits. Le budget 2023 prévoit que, dans une telle situation, un seul crédit pourra être demandé pour ce bien ou cette machine. Ainsi, les contribuables gagneront à analyser soigneusement les crédits d’impôt pour choisir le plus avantageux selon leur situation et les critères d’admissibilité. C’est le crédit d’impôt pour l’hydrogène qui offre le taux le plus élevé : 40 % des dépenses admissibles si le projet présente le plus faible niveau d’IC et respecte les exigences relatives à la main-d’œuvre.
Taux d’imposition réduits pour les fabricants de technologies à zéro émission
Le budget 2021 a réduit les taux d’imposition sur le revenu des sociétés pour les entreprises admissibles de fabrication de technologies à zéro émission. Le budget 2023 propose quant à lui d’étendre l’admissibilité aux taux réduits afin d’inclure la fabrication d’équipement d’énergie nucléaire, le traitement et le recyclage des combustibles nucléaires et de l’eau lourde, ainsi que la fabrication de barres de combustible, pour les exercices commençant après 2023.
En outre, le budget 2023 prolonge de trois ans la disponibilité des taux réduits : ceux-ci seront éliminés progressivement à partir de 2032 plutôt que 2029, puis devraient disparaître en 2034 plutôt qu’en 2031.
Inclusion du lithium à partir de saumures parmi les minéraux critiques
Le budget 2023 prévoit que le lithium à partir de saumures deviendra une ressource minérale et un minéral critique aux fins de la Loi de l’impôt sur le revenu. À compter du jour du budget, les dépenses relatives à ce type de lithium seraient admissibles à titre de frais d’exploration au Canada ou de frais d’aménagement au Canada couverts par le crédit d’impôt pour l’exploration minière instauré dans le budget 2022.
par Ted Thiessen
Mise en garde
Le contenu du présent document ne fournit qu’un aperçu du sujet et ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt obtenir des conseils juridiques précis.
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