Modification de la Loi canadienne sur les sociétés par actions – Le projet de loi C-25 reçoit la sanction royale
Modification de la Loi canadienne sur les sociétés par actions – Le projet de loi C-25 reçoit la sanction royale
Le projet de loi C-25[1], qui apporte plusieurs modifications clés à la Loi canadienne sur les sociétés par actions (la « LCSA »), a été sanctionné le 1er mai 2018. Les modifications les plus importantes du projet de loi C-25 et de ses règlements d’application (collectivement, les « modifications proposées ») entreront en vigueur à une date ultérieure fixée par décret.
Les modifications proposées changent les exigences relatives à l’élection des administrateurs, rendent obligatoire la présentation de certains renseignements relatifs à la diversité et ont des incidences sur les communications avec les actionnaires de sociétés ouvertes de régime fédéral. Bien que les modifications proposées coïncident en grande partie avec les exigences que la Bourse de Toronto (la « TSX ») impose actuellement aux sociétés inscrites à sa cote en matière de gouvernance, elles en étendent certaines. En outre, les sociétés constituées en vertu de la LCSA qui sont inscrites sur un marché qui n’est pas la TSX seront bientôt tenues de se conformer à des exigences analogues à celles de la TSX en matière de gouvernance et d’information.
A) Modifications relatives à l’élection des administrateurs
Élection à la majorité
À l’heure actuelle, la LCSA prévoit un système de vote à la « pluralité » des voix. Selon ce régime, les actionnaires peuvent soit exprimer une voix en faveur des candidats au poste d’administrateur, soit s’abstenir de voter. Une « abstention » ne compte pas comme une voix contre un administrateur de sorte que, dans le cadre d’une élection non contestée, un candidat est élu dès qu’il obtient une seule voix, peu importe le nombre d’abstentions comptabilisées à son égard.
Les modifications proposées imposeront une obligation relative au vote majoritaire et un vote distinct « pour » ou « contre » chaque candidat au poste d’administrateur. Les sociétés inscrites à la TSX sont actuellement tenues (à quelques exceptions près) d’adopter une politique sur l’élection à la majorité, selon laquelle un candidat au poste d’administrateur qui est élu dans le cadre d’une élection non contestée après avoir obtenu un plus grand nombre d’abstentions que de votes en sa faveur est considéré ne pas avoir reçu le soutien des actionnaires et doit ensuite remettre sa démission à titre d’administrateur. Le conseil d’administration est tenu d’accepter cette démission, sauf lorsque des « circonstances exceptionnelles » justifient que cet administrateur continue de siéger au conseil. On doit noter que cette politique d’élection à la majorité ne s’applique pas à des élections contestées où le nombre de candidats est supérieur au nombre de postes d’administrateur à pourvoir.
Selon les modifications proposées, un candidat n’est élu à titre d’administrateur que si la majorité des voix exprimées sont en sa faveur. Par conséquent, la loi n’aura plus à prévoir l’obligation des administrateurs de remettre leur démission à l’issue d’un vote ni le pouvoir discrétionnaire du conseil d’accepter ou de refuser une démission.
Élections annuelles des administrateurs et interdiction des votes sur des listes
Bien que ces dispositions soient rarement utilisées au Canada, la LCSA permet actuellement que les administrateurs soient élus pour un mandat d’au plus trois ans. Les modifications proposées prévoient des élections annuelles pour les sociétés de régime fédéral, à l’instar des exigences actuelles de la TSX.
En outre, les modifications proposées exigent que chaque administrateur soit élu par un vote distinct et non un vote portant sur une liste de candidats, ce qui est aussi conforme aux exigences de la TSX et évite un casse-tête aux actionnaires qui ne souhaitent pas accorder leur appui à un administrateur, mais sont disposés à soutenir les autres candidats.
Nominations intérimaires par les administrateurs
À l’heure actuelle, la LCSA prévoit que les administrateurs peuvent nommer des administrateurs supplémentaires entre les assemblées annuelles des actionnaires sans l’approbation des actionnaires (à condition que ces nominations n’excèdent pas le tiers du nombre d’administrateurs élus par les actionnaires), mais uniquement si les statuts de la société le permettent.
Les modifications proposées font de ce pouvoir discrétionnaire un droit, à moins de disposition contraire des statuts. Le nombre d’administrateurs nommés par le conseil demeurera assujetti à une limite du tiers du nombre d’administrateurs élus à la dernière assemblée annuelle. Toutefois, les modifications proposées imposent une restriction supplémentaire quant à ce droit, en ce que le conseil ne peut nommer un candidat qui avait obtenu une majorité de voix contre lui à l’assemblée des actionnaires précédente, à moins que cette nomination ne soit nécessaire pour satisfaire aux exigences de résidence canadienne ou à l’exigence selon laquelle au moins deux des administrateurs ne doivent faire partie également ni des dirigeants ni des employés de la société.
B) Exigences améliorées de présentation aux actionnaires de renseignements relatifs à la diversité
Les modifications proposées adoptent le modèle « se conformer ou s’expliquer » pour la présentation des politiques et des pratiques en matière de diversité. À l’appui de la diversité au sein des administrateurs et des membres de la haute direction, les sociétés régies par la LCSA seront tenues de présenter à chaque assemblée annuelle des actionnaires leurs réalisations sur le plan de la diversité et les politiques et pratiques qu’elles ont instaurées en la matière. Ce modèle, que les autorités canadiennes en valeurs mobilières ont aussi adopté pour les sociétés inscrites à la TSX, a été louangé par certains et décrié par d’autres parce qu’il était trop rigoureux ou, au contraire, ne l’était pas assez. Le modèle « se conformer ou s’expliquer », qui a remporté du succès au Royaume-Uni et en Australie, est considéré comme moins intrusif que l’instauration de cibles ou de quotas obligatoires en matière de diversité (qui ont été établis dans certains territoires comme la Norvège). Cette progression vers une diversité accrue s’explique par la perception généralisée selon laquelle la diversité sur le plan des genres et de l’origine ethnique dans l’équipe de haute direction et au conseil d’administration d’une société se traduira par des rendements supérieurs pour les actionnaires.
Quoiqu’elles soient similaires aux exigences de présentation existantes qui s’appliquent aux sociétés inscrites à la TSX aux termes de la Norme canadienne 58‑101 sur les pratiques en matière de gouvernance (au Québec, le Règlement 58‑101 sur les pratiques en matière de gouvernance), les modifications proposées ajoutent à ces exigences et les portent au-delà de la présentation de l’information sur la diversité des genres. Plus précisément, l’information requise visera les membres des « groupes désignés » qui incluent (en vertu de la Loi sur l’équité en matière d’emploi[2] ) les autochtones, les personnes handicapées et les personnes qui font partie des minorités visibles, en plus des femmes. Les modifications proposées précisent que la définition de « groupes désignés » inclut, sans limitation, les groupes visés par la définition énoncée dans la Loi sur l’équité en matière d’emploi, ce qui laisse entrevoir la possibilité que d’autres groupes soient ajoutés au moyen de règlements futurs.
Aux termes des modifications proposées, une société ouverte de régime fédéral sera tenue de présenter l’information sur le niveau actuel de représentation des groupes désignés, ainsi que l’information suivante :
- a-t-elle adopté une cible à l’égard de la représentation des groupes désignés au sein de son conseil ou à des postes de haute direction;
- a-t-elle adopté des politiques sur le repérage, la mise en candidature et la sélection de membres de groupes désignés aux postes d’administrateur et au sein de la haute direction.
Si aucune cible ni politique à l’égard de la représentation des groupes désignés n’a été adoptée, la société devra l’indiquer et expliquer pourquoi il en est ainsi (d’où l’expression « se conformer ou s’expliquer »).
Les modifications proposées quant à la présentation de renseignements relatifs à la diversité entreront en vigueur à une date ultérieure fixée par décret (et non au moment de la sanction royale). Elles prévoient aussi que ces dispositions feront l’objet d’un examen par un comité gouvernemental cinq ans après leur entrée en vigueur.
C) Notification et accès
Les autorités canadiennes en valeurs mobilières permettent aux sociétés ouvertes de remettre les documents de sollicitation de procurations et les états financiers aux actionnaires par voie électronique en se prévalant des dispositions sur « la notification et l’accès ». Selon ces dispositions, ces documents sont affichés en ligne, et un avis à l’égard des documents affichés est donné aux actionnaires, conformément à la législation en valeurs mobilières applicable. Toutefois, en raison d’un certain nombre de questions techniques, notamment la nécessité de l’obtention d’un consentement exprès et écrit des actionnaires avant l’envoi de documents électroniques, les sociétés régies par la LCSA, de façon générale, n’ont pu se prévaloir des dispositions sur la notification et l’accès. Les modifications proposées permettront aux sociétés ouvertes de recourir à la communication électronique comme premier moyen d’envoi des documents de sollicitation de procurations et des états financiers aux actionnaires. Toutefois, les sociétés fermées régies par la LCSA demeureront tenues d’envoyer ces documents aux actionnaires, à moins que ceux-ci ne les informent qu’ils ne souhaitent pas les recevoir.
Les modifications proposées quant à la notification et à l’accès entreront en vigueur à une date ultérieure fixée par décret (et non au moment de la sanction royale).
Si vous avez besoin de conseils au sujet de ces modifications, veuillez communiquer avec les membres du groupe Marchés des capitaux et F&A.
par Laura Fraser, Paul Collins, Leila Rafi, Alex Bruvels et Christie Bates
[1] Loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions, la Loi canadienne sur les coopératives, la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif et la Loi sur la concurrence.
[2] Loi sur l’équité en matière d’emploi, L.C. 1995, ch. 44.
Mise en garde
Le contenu du présent document fournit un aperçu de la question, qui ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt consulter ses propres conseillers juridiques.
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