Les fonds alternatifs liquides sont maintenant une réalité Le régime des organismes de placement collectif alternatifs devrait prendre effet le 3 janvier 2019
Les fonds alternatifs liquides sont maintenant une réalité Le régime des organismes de placement collectif alternatifs devrait prendre effet le 3 janvier 2019
Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (les « ACVM ») ont publié la version définitive tant attendue des modifications qui établissent un régime de « fonds alternatifs liquides » au Canada (les « règles définitives »).
Les règles définitives prennent effet le 3 janvier 2019 et modifient les dispositions de la Norme canadienne 81-102 sur les fonds d’investissement (au Québec, le Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement, le « Règlement 81-102 ») et les règlements connexes qui s’appliquaient auparavant aux organismes de placement collectif (les « OPC ») classiques et aux fonds d’investissement à capital fixe. Ainsi, elles créent une nouvelle catégorie de fonds d’investissement faisant publiquement appel à l’épargne appelés « OPC alternatifs ». Les OPC alternatifs sont dotés d’objectifs de placement leur permettant d’investir dans des marchandises physiques ou des dérivés visés, d’emprunter des fonds ou d’effectuer des ventes à découvert d’une manière généralement non permise aux OPC classiques « positions acheteur seulement ».
Les ACVM ont confirmé que les règles définitives reflètent leurs efforts qui visent la modernisation du régime existant applicable aux fonds marché à terme aux fins de l’établissement d’un cadre réglementaire plus efficace et pertinent au Canada, de même que la facilitation de l’utilisation de stratégies alternatives et plus innovantes de pair avec le maintien des restrictions qui, de l’avis des ACVM, sont appropriées dans le cas des produits pouvant être offerts aux investisseurs individuels.
Avant l’adoption des règles définitives, les stratégies de placement alternatives n’étaient généralement offertes qu’aux Canadiens appartenant à la catégorie des « investisseurs qualifiés » (ou répondant aux critères d’une autre dispense de prospectus), par l’entremise de fonds en gestion commune offerts par voie de notice d’offre. Les règles définitives, qui se situent dans la même veine que le régime européen des OPCVM[1] et que la Loi de 1940[2] portant sur les fonds offerts aux investisseurs individuels aux États‑Unis, représentent un changement important dans le secteur canadien des fonds d’investissement. En effet, les OPC alternatifs pourront procéder au placement permanent de leurs titres auprès des investisseurs particuliers par voie de prospectus simplifié, essentiellement de la même manière que le font les organismes de placement collectif classiques.
Les fonds marché à terme, qui étaient auparavant placés en vertu de la Norme canadienne 81‑104 sur les fonds marché à terme (au Québec, le Règlement 81-104 sur les fonds marché à terme, le « Règlement 81-104 »), seront désormais englobés dans la catégorie des OPC alternatifs (et redésignés comme tels) et régis par les dispositions du Règlement 81-102 applicables à ces derniers. Le Règlement 81-104 demeurera en vigueur (du moins pour le moment) et sera renommé Règlement 81-104 sur les organismes de placement collectif alternatifs, sa seule partie opérante devant porter sur les normes de formation pour les courtiers en épargne collective qui placent des titres d’OPC alternatifs. Ces normes demeurent les mêmes que celles qui s’appliquent actuellement au placement de titres de fonds marché à terme. Le Règlement 81-104 devrait être abrogé lorsque les ACVM adopteront de nouvelles normes de formation dans le cadre de l’examen qu’elles font de questions propres aux courtiers.
Les règles définitives modifient aussi certaines dispositions du Règlement 81-102 qui s’appliquent tant aux organismes de placement collectif classiques qu’aux fonds d’investissement à capital fixe.
Contexte
Les ACVM se sont employées au cours des dernières années à moderniser la réglementation canadienne sur les produits de fonds d’investissement. En 2012, dans le cadre de la phase 1 du projet de modernisation, elles ont inscrit dans la réglementation les dispenses discrétionnaires octroyées fréquemment aux organismes de placement collectif classiques, en reconnaissance de l’évolution des marchés et des produits. Les modifications de la phase 1 sont pour la plupart entrées en vigueur le 30 avril 2012.
En 2014, dans le cadre de la phase 2, les ACVM ont imposé des restrictions en matière de placement et des obligations opérationnelles de base aux fonds d’investissement à capital fixe et ont renforcé, pour tous les fonds d’investissement, les obligations d’information concernant les activités de prêt de titres. Une grande partie des modifications de la phase 2 sont entrées en vigueur le 22 septembre 2014.
À la deuxième étape de la phase 2, les ACVM ont publié pour consultation un projet d’encadrement réglementaire des fonds alternatifs le 27 mars 2013 et sollicité des observations sur les principaux paramètres d’un régime de fonds alternatifs faisant appel public à l’épargne. Après une prolongation de la période de consultation, les projets de modifications du Règlement 81‑102 et des règlements connexes ont été publiés le 22 septembre 2016 pour une période de consultation de 90 jours (les « projets de modifications de 2016 »). Les ACVM ont reçu et analysé au total 41 mémoires sur les projets de modifications de 2016.
Plus tôt cette année, les autorités en valeurs mobilières ont commencé à accorder des dispenses à certains « fonds alternatifs » devant être offerts sur le fondement des projets de modifications de 2016. Ces dispenses expireront au moment de l’entrée en vigueur des règles définitives, qui s’appliqueront dès lors à ces fonds.
Sommaire des règles définitives
Ce qui a changé par rapport aux projets de modifications de 2016
Les règles définitives renferment plusieurs changements dignes de mention par rapport aux projets de modifications de 2016.
- cette catégorie de fonds d’investissement sera appelée « OPC alternatifs », plutôt que « fonds alternatifs », et la définition de « OPC alternatif » dans le Règlement 81‑102 a été légèrement modifiée;
- la limite de concentration de 10 % (de la valeur liquidative) dans les titres d’un seul émetteur pour les ventes à découvert ne s’appliquera pas à la vente à découvert de « titres d’État » (au sens du Règlement 81‑102);
- les OPC alternatifs et les fonds d’investissement à capital fixe auront le droit de contracter des emprunts auprès d’entités nationales et étrangères qui peuvent remplir les fonctions de dépositaire ou de sous-dépositaire en vertu du Règlement 81‑102. Les projets de modifications de 2016 prévoyaient que seuls les emprunts auprès d’entités canadiennes seraient autorisés;
- la limite globale de l’effet de levier pour les OPC alternatifs demeurera de 300 % de la valeur liquidative (la « VL »), le calcul de l’effet de levier exclura certaines opérations sur dérivés visés dans un but de « couverture », au sens attribué à ce terme dans le Règlement 81-102;
- les exigences concernant l’admissibilité des entités à titre de dépositaire ou de sous-dépositaire d’un fonds d’investissement ont été modifiées. Il n’est plus nécessaire que les membres du même groupe qu’une banque ou qu’une société de fiducie aient des états financiers publiés attestant que ces entités respectent le seuil de capitaux propres (mais des états financiers attestant que ces entités respectent le seuil de capitaux propres demeurent requis);
- les OPC alternatifs et les fonds d’investissement à capital fixe auront le droit de de déposer des actifs pouvant représenter jusqu’à 25 % de leur VL auprès d’un seul agent prêteur (à l’exception du dépositaire ou du sous-dépositaire du fonds) à titre de sûreté à l’égard d’une vente à découvert de titres. Il s’agit d’une augmentation par rapport à la limite de 10 % prévue dans les projets de modifications de 2016;
- Le Règlement 81-104 ne demeurera en vigueur qu’à l’égard des normes de formation pour les courtiers en épargne collective qui placent des titres d’OPC alternatifs et sera renommé Règlement 81-104 sur les organismes de placement collectif alternatifs.
Un commentaire plus détaillé sur les règles définitives est présenté ci-après. Pour consulter le texte intégral des règles définitives, veuillez cliquer ici.
Définition d’OPC alternative et convention de désignation
Dans les règles définitives, on entend par “OPC alternatif » un organisme de placement collectif ayant adopté des objectifs de placement lui permettant d’investir dans des marchandises physiques ou des dérivés visés, d’emprunter des fonds ou d’effectuer des ventes à découvert d’une manière généralement non permise aux autres OPC.
Cette catégorie, dont la portée est intentionnellement large, est similaire à la définition de « fonds marché à terme » énoncée auparavant dans le Règlement 81‑104. Cette définition a été modifiée par rapport aux projets de modifications de 2016 de façon à ce qu’elle exclue expressément les fonds de métaux précieux, qui constituent dorénavant une catégorie distincte de fonds d’investissement en vertu du Règlement 81‑102.
Les règles définitives n’imposent pas de convention de désignation. Un OPC alternatif n’est pas tenu d’utiliser dans sa désignation le terme « alternatif » ou un autre terme indiquant qu’il appartient à cette catégorie de fonds. Toutefois, l’Instruction générale relative au Règlement 81-102, en sa version modifiée, précise que, de l’avis des ACVM, les OPC faisant appel public à l’épargne ne devraient utiliser le mot « alternatif » dans leur nom que s’ils sont admissibles à ce titre, et cela, pour éviter de semer la confusion sur le marché.
Restrictions en matière de concentration
Les placements qu’effectuent les OPC alternatifs dans les titres d’un seul émetteur ne peuvent excéder 20 % de la VL du fonds au moment de l’acquisition (comparativement à 10 % dans le cas des OPC classiques). Cette limite de concentration de 20 % ne s’applique pas à l’acquisition de certains titres[3], notamment aux titres d’État (au sens du Règlement 81‑102).
Les fonds d’investissement à capital fixe qui, auparavant, n’étaient assujettis à aucune restriction en matière de concentration, sont aussi visés par cette limite de 20 % en vertu des règles définitives.
Placements dans des marchandises physiques
Les OPC alternatifs sont dispensés de toute restriction relative aux placements dans des marchandises physiques en vertu des règles définitives. Les fonds d’investissement à capital fixe continuent d’être dispensés de ces restrictions.
En vertu des règles définitives, les OPC classiques, qui ne pouvaient essentiellement investir que dans l’or, peuvent dorénavant investir (directement ou indirectement au moyen de dérivés visés) dans l’or, l’argent, le palladium et le platine, sous réserve d’une limite globale de 10 % de la VL. Les ACVM ont aussi ajouté un critère de « transparence » pour évaluer la conformité des placements de fonds de fonds à cette limite. Ces changements correspondent aux dispenses discrétionnaires fréquemment accordées aux OPC en général. On reconnaît ainsi que les marchandises physiques sont une catégorie d’actifs qui peut être utilisée efficacement dans un portefeuille de placements diversifié.
Actifs non liquides
Les placements qu’effectuent les OPC alternatifs dans des actifs non liquides sont limités à 10 % de la VL après l’acquisition et à un plafond fixe de 15 % en tout temps. Cette même restriction s’applique actuellement aux OPC classiques.
Les fonds d’investissement à capital fixe, qui n’étaient pas soumis à des restrictions à ce titre, seront désormais assujettis à une limite sur les placements dans des actifs non liquides de 20 % de leur VL, au moment de l’acquisition, avec un plafond fixe de 25 % de la VL en tout temps. Il pourrait s’agir d’un changement important pour les fonds d’investissement à capital fixe axés sur les actifs non liquides.
Aucun changement de fond n’est apporté à la définition d’« actif non liquide »[4] dans les règles définitives. Par conséquent, elles n’englobent pas nécessairement certains actifs susceptibles d’intéresser divers gestionnaires d’OPC. Les révisions que les ACVM pourraient envisager à l’égard de cette définition seront apportées séparément.
Emprunts de fonds
Les OPC alternatifs peuvent emprunter des fonds représentant jusqu’à 50 % de leur VL. Les emprunts ne peuvent être contractés qu’auprès d’entités pouvant remplir les fonctions de dépositaire ou de sous-dépositaire de fonds d’investissement en vertu de l’article 6.2 ou 6.3 du Règlement 81-102, ce qui limite essentiellement les emprunts aux banques et aux sociétés de fiducie canadiennes ou étrangères (ou aux membres de leur groupe qui sont des courtiers qualifiés). Cela constitue un changement important par rapport aux projets de modifications de 2016, qui restreignaient les emprunts de fonds aux institutions financières canadiennes.
Lorsque le prêteur est membre du même groupe que le gestionnaire de placements de l’OPC alternatif, l’approbation du comité d’examen indépendant de ce fonds sera requise en vertu de la Norme canadienne 81‑107 sur le comité d’examen indépendant des fonds d’investissement (au Québec, le Règlement 81-107 sur le comité d’examen indépendant des fonds d’investissement)[5].
Toute convention d’emprunt conclue avec un membre du même groupe que le gestionnaire doit être conforme aux pratiques courantes du secteur et aux conditions commerciales usuelles pour les conventions de cette nature.
Les fonds d’investissement à capital fixe, qui ne sont actuellement soumis à aucune restriction en matière d’emprunt, seront désormais assujettis aux mêmes restrictions d’emprunt qui s’appliquent aux OPC alternatifs.
Aucune modification n’a été apportée, dans les règles définitives, aux restrictions en matière d’emprunt qui s’appliquent aux OPC classiques.
Ventes à découvert
Les OPC alternatifs pourront vendre des titres à découvert jusqu’à 50 % de leur VL (comparativement à 20 % dans le cas des OPC classiques et à 40 %, aux termes de dispense, dans le cas des fonds marché à terme). De plus, aux fins de la facilitation des stratégies de positions acheteur et vendeur, les OPC alternatifs ne seront plus tenus de maintenir une couverture en espèces à l’égard de ventes à découvert et pourront affecter le produit de ventes à découvert à l’achat d’autres titres.
Les OPC alternatifs sont généralement assujettis à une limite de 10 % de leur VL pour la vente à découvert de titres d’un seul émetteur (comparativement à 5 % dans le cas des OPC classiques). Toutefois, changement notable par rapport aux projets de modifications de 2016, la limite de 10 % de la VL ne s’appliquera pas à la vente à découvert de « titres d’État », au sens du Règlement 81-102, qu’effectue un OPC alternatif.
Les fonds d’investissement à capital fixe sont assujettis aux mêmes restrictions que les OPC alternatifs en matière de ventes à découvert.
Une autre modification importante par rapport aux projets de modifications de 2016 a été apportée à l’article 6.8.1 du Règlement 81-102 quant à la limite d’actifs en portefeuille qui peuvent être déposés à titre de sûreté auprès d’un agent prêteur (à l’exception du dépositaire ou d’un sous-dépositaire) à l’égard de ventes à découvert de titres. Cette limite a été portée à 25 % de la VL dans le cas des OPC alternatifs (ou des fonds d’investissement à capital fixe), comparativement à la limite de 10 % de la VL fixée dans les projets de modifications de 2016, ce qui offrira aux fonds une souplesse dont ils ont besoin lorsqu’ils concluent des arrangements avec des contreparties relativement à des ventes de titres à découvert.
Limite combinée applicable à l’emprunt de fonds et à la vente à découvert
Le montant global des emprunts de fonds et des ventes à découvert effectués par les OPC alternatifs et les fonds d’investissement à capital fixe est limité à 50 % de la VL. Cette limite est la même que celle que prévoyaient les projets de modifications de 2016.
Utilisation de dérivés
En vertu des règles définitives, les OPC alternatifs, contrairement aux OPC classiques, peuvent utiliser, directement ou indirectement, des dérivés visés aux fins de placement ou créer un effet de levier synthétique. Auparavant, seuls les fonds marché à terme pouvaient créer un effet de levier à l’aide de dérivés visés.
Exigences relatives aux contreparties à des opérations sur dérivés et limites d’exposition
Les règles définitives inscrivent dans la réglementation la dispense discrétionnaire qui était accordée auparavant aux OPC classiques aux fins de la facilitation de leur conformité à la loi Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection aux États-Unis et à la législation similaire en Europe les obligeant à avoir recours aux systèmes d’une chambre de compensation dûment autorisée pour réaliser des opérations sur certains dérivés de gré à gré. Ces modifications inscrites dans la réglementation s’appliquent à tous les fonds d’investissement assujettis au Règlement 81-102.
Contrairement aux OPC classiques et aux fonds marché à terme, qui devaient traiter avec des contreparties ayant une « notation désignée », les OPC alternatifs seront dispensés de cette exigence, ce qui leur permettra de conclure des opérations sur dérivés de gré à gré avec un éventail plus large de contreparties (c.-à-d. des contreparties n’ayant pas une « notation désignée »). Cette possibilité sera avantageuse pour les OPC alternatifs, tant sur le plan des prix que des produits.
Toutefois, les OPC alternatifs ne peuvent ignorer entièrement la note de crédit de leur contrepartie à une opération sur dérivés. Selon un changement apporté aux projets de modifications de 2016, les OPC alternatifs et les fonds d’investissement à capital fixe pourront dépasser la limite d’exposition, évaluée au marché, de 10 % de la VL relativement à une seule contrepartie à une opération sur dérivés visés, si cette contrepartie a reçu une « notation désignée » (de façon générale, une note d’au moins A à l’égard de sa dette à long terme).
Le nouveau régime des dérivés esquissé dans les règles définitives constitue un compromis parfait entre les règles existantes qui s’appliquent aux OPC classiques (qui comprennent un critère de solvabilité et des limites d’exposition) et celles qui s’appliquent aux fonds marché à terme (qui comprennent un critère de solvabilité, mais pas de limites d’exposition). Contrairement aux OPC classiques, les OPC alternatifs et les fonds d’investissement à capital fixe ne seront pas tenus de s’assurer qu’une contrepartie respecte le critère de solvabilité, à condition que l’exposition à cette contrepartie demeure inférieure à 10 % de la VL. Toutefois, si une contrepartie a reçu une notation désignée, ces fonds peuvent obtenir une exposition plus élevée à cette contrepartie.
Limite globale de l’effet de levier
La limite globale de l’effet de levier auquel un OPC alternatif a recours par emprunt de fonds, vente à découvert et opération sur dérivés visés demeure fixée à 300 % de la VL, comme le prévoyaient les projets de modifications de 2016. Cependant, la formule de calcul de l’exposition brute d’un OPC alternatif a été modifiée.
Pour établir l’exposition globale, l’OPC ou le fonds doit additionner les éléments suivants et diviser la somme obtenue par sa VL :
- l’encours total de ses emprunts;
- la valeur marchande des titres vendus à découvert;
- la valeur notionnelle globale de ses positions sur dérivés visés, moins la valeur notionnelle globale des positions sur dérivés visés conclus dans un but de « couverture », au sens du Règlement 81-102 (mise en relief ajoutée).
Aux fins du calcul de l’exposition globale, les OPC alternatifs sont dorénavant autorisés à déduire la valeur notionnelle des dérivés visés utilisés dans un but de couverture. Le calcul décrit ci-dessus mesurera plus exactement le montant véritable de l’effet de levier utilisé dans les stratégies d’investissement du fonds, car les opérations de couverture ont généralement pour effet de réduire l’effet de levier, plutôt que de l’augmenter.
On doit noter que la limite globale de l’effet de levier comprend l’exposition qu’obtient un OPC alternatif en effectuant des placements dans des OPC alternatifs sous-jacents qui peuvent avoir recours eux aussi à l’effet de levier (c’est-à-dire qu’un critère de transparence est appliqué aux fins de l’établissement de l’effet de levier total).
Le fonds doit calculer la limite globale de l’effet de levier chaque jour où il calcule sa valeur liquidative (soit, dans la plupart des cas, quotidiennement). Si la limite relative à l’effet de levier est dépassée, il doit prendre, dès qu’il lui est commercialement possible de le faire, toutes les mesures nécessaires pour réduire l’exposition.
La limite relative à l’effet de levier établie à 300 % de la VL s’écarte des règles antérieures visant les fonds marché à terme, puisque celles-ci ne prévoyaient pas de limite d’exposition notionnelle.
Les fonds d’investissement à capital fixe seront soumis à cette limite relative à l’effet de levier de 300 % de la VL prévue aux règles définitives, mais ils bénéficieront d’une période de transition prolongée pour se conformer à cette exigence.
Une information précise doit être fournie dans le prospectus et l’aperçu du fonds ou l’aperçu du FNB[6] de l’OPC alternatif[7] ou dans le prospectus d’un fonds d’investissement à capital fixe, le cas échéant, et dans les états financiers en ce qui a trait à l’utilisation de l’effet de levier.
Placements de fonds de fonds
Les OPC classiques pourront investir jusqu’à (i) 100 % de leur VL dans d’autres OPC, y compris des FNB, autres que des OPC alternatifs; et (ii) 10 % de leur VL dans des OPC alternatifs et des fonds d’investissement à capital fixe, à condition que ces fonds sous-jacents soient assujettis au Règlement 81‑102.
Les dispositions du Règlement 81‑102 sur les placements de fonds de fonds pourraient faire croître considérablement la demande d’OPC alternatifs, car l’actif des OPC classiques au Canada s’élève à environ 1,5 T$.
Les OPC alternatifs pourront investir jusqu’à 100 % de leur VL dans d’autres OPC (y compris d’autres OPC alternatifs) ou dans des fonds d’investissement à capital fixe, à condition que, dans chaque cas, ces fonds sous-jacents soient assujettis au Règlement 81‑102.
Les règles définitives suppriment la restriction selon laquelle un fonds dominant ne peut investir que dans un fonds sous-jacent qui est un émetteur assujetti dans le même territoire que lui. Dorénavant, un fonds dominant peut investir dans un fonds sous-jacent dans la mesure où celui-ci est un émetteur assujetti dans au moins un territoire au Canada.
Les règles définitives ne modifient pas les dispositions sur les placements de fonds de fonds applicables aux fonds d’investissement à capital fixe.
Les placements dans des fonds d’investissement qui ne sont pas des émetteurs assujettis (c’est-à-dire des fonds privés) demeurent interdits pour tous les fonds d’investissement.
Rachats et calcul de la VL
Les OPC alternatifs pourront racheter des titres du fonds à la VL de ces titres établis le premier ou le deuxième jour ouvrable qui suit la date de réception de l’ordre de rachat, si les conditions suivantes sont remplies : (1) le fonds a établi une politique prévoyant que le prix de rachat est calculé de cette manière; et (ii) cette politique a été décrite dans le prospectus simplifié du fonds avant sa prise d’effet.
Les OPC alternatifs doivent verser le produit du rachat des titres faisant l’objet de l’ordre de rachat au plus tard 15 jours ouvrables après la date d’évaluation à laquelle le prix de rachat a été établi.
Les OPC alternatifs pourront également suspendre les rachats pour une période de six mois à compter de la date de délivrance du visa à l’égard du prospectus simplifié initial du fonds, à condition que l’information à ce sujet ait été communiquée dans le prospectus. Nous ne croyons pas qu’un grand nombre d’OPC alternatifs choisiront de décréter une telle suspension, car elle pourrait avoir un effet défavorable sur les ventes.
Rémunération au rendement
Contrairement aux OPC classiques, qui ne peuvent verser qu’une rémunération calculée en fonction d’un indice de référence ou d’un indice, les OPC alternatifs disposeront de beaucoup plus de latitude pour la formulation et le calcul de la rémunération au rendement exigée du fonds. L’information sur le mode de calcul de la rémunération incitative doit être communiquée dans le prospectus simplifié de l’OPC alternatif, et le versement de la rémunération incitative doit être fondé sur le rendement total cumulatif du fonds pour la période ayant commencé immédiatement après la dernière période pour laquelle la rémunération au rendement a été versée (c.-à-d. que le versement de la rémunération incitative est assujetti à un seuil cumulatif permanent).
Normes de formation et placement
Les titres des OPC alternatifs doivent en général être placés par des courtiers membres de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières. Les normes de formation de ces courtiers sont prévues au paragraphe 1 de l’article 3.4 de la Norme canadienne 31-103 sur les obligations et dispenses d’inscription et les obligations continues des personnes inscrites (au Québec, le Règlement 31-103 sur les obligations et dispenses d’inscription et les obligations continues des personnes inscrites, le « Règlement 31‑103 »). Ce paragraphe énonce ce qui suit : « La personne physique qui exerce une activité nécessitant l’inscription possède la scolarité, la formation et l’expérience qu’une personne raisonnable jugerait nécessaires pour l’exercer… ».
De façon générale, les courtiers en épargne collective ne pourront placer des titres d’OPC alternatifs que s’ils respectent les exigences de formation qui demeurent prévues au Règlement 81-104. Selon ces exigences (qui s’appliquent actuellement au placement des titres de fonds marché à terme), le représentant de courtier dont les activités sont restreintes aux OPC doit remplir au moins une des conditions suivantes :
- il a obtenu la note de passage pour le cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada;
- il a obtenu la note de passage pour le cours d’initiation aux produits dérivés;
- il a réussi le Chartered Financial Analyst Program;
- il répond à toute autre norme de formation applicable imposée par un organisme d’autoréglementation.
Les ACVM sont à examiner les questions propres aux courtiers, et elles estiment que tout changement important aux normes de formation des courtiers doit être traité de façon plus globale. On prévoit que les ACVM abrogeront le Règlement 81-104 dans son intégralité lorsque les nouvelles normes de formation des courtiers en épargne collective seront en place.
Les courtiers sur le marché dispensé ne sont pas autorisés à placer des titres d’OPC alternatifs offerts au moyen d’un prospectus simplifié.
Forme du prospectus et information au moment de la souscription
Les titres des OPC alternatifs seront généralement placés de la même manière que ceux des OPC classiques. Les OPC alternatifs qui ne sont inscrits à la cote d’aucune bourse seront assujettis aux mêmes règles de présentation de l’information que celles qui s’appliquent aux OPC classiques en vertu de la Norme canadienne 81‑101 sur le régime de prospectus des organismes de placement collectif (au Québec, le Règlement 81-101 sur le régime de prospectus des organismes de placement collectif, le « Règlement 81-101 »). Ils devront donc établir un prospectus simplifié et une notice annuelle, ainsi qu’un aperçu du fonds pour chaque catégorie ou série de parts du fonds, ce dernier devant être transmis aux investisseurs au moment de la souscription.
Bien que de multiples fonds d’investissement puissent normalement être regroupés dans le même prospectus simplifié, le prospectus simplifié d’un OPC alternatif ne peut être combiné avec celui d’un OPC classique, cette règle visant à prévenir toute confusion potentielle.
Un OPC alternatif devra inclure, dans son prospectus et l’aperçu du fonds, un libellé encadré indiquant qu’il est un OPC alternatif selon le Règlement 81‑102, précisant la façon dont il diffère des OPC classiques et donnant de l’information additionnelle sur ses prêteurs (si le fonds compte contracter des emprunts) ainsi que sur l’utilisation de l’effet de levier.
Les fonds d’investissement à capital fixe, les OPC alternatifs qui sont inscrits à la cote d’une bourse et les FNB devront placer leurs titres au moyen d’un prospectus ordinaire et un aperçu du FNB.
Arrangements concernant la garde de l’actif
Les OPC alternatifs sont tenus de nommer un dépositaire unique au Canada, mais ils peuvent avoir un ou plusieurs sous-dépositaires qui détiennent l’actif du fonds. Dans le cas de l’actif du portefeuille qui est détenu au Canada, le dépositaire ou le sous-dépositaire doit remplir les conditions prévues à l’article 6.2 du Règlement 81‑102. Dans le cas de l’actif du portefeuille qui est détenu par un sous-dépositaire à l’extérieur du Canada, le sous-dépositaire doit remplir les conditions prévues à l’article 6.3 du Règlement 81‑102.
Les règles définitives ont modifié les exigences selon lesquelles les membres du groupe de banques et de sociétés de fiducie canadiennes et étrangères peuvent remplir les fonctions de dépositaire ou de sous‑dépositaire aux termes des articles 6.2 et 6.3 du Règlement 81‑102. Ces entités ne sont plus tenues d’avoir des états financiers « publiés » indiquant qu’elles ont l’actif net requis (bien que des états financiers indiquant le montant requis d’actif net soient toujours nécessaires). Ce changement signifie que les courtiers principaux (appelés maisons de courtage de premier ordre dans l’Avis) appartenant à des banques au Canada et à l’étranger pourront vraisemblablement répondre aux conditions pour remplir les fonctions de dépositaire ou de sous‑dépositaire (selon le cas) d’un fonds d’investissement faisant appel public à l’épargne. Par conséquent, les OPC alternatifs et les fonds d’investissement à capital fixe disposeront d’une souplesse accrue pour leurs arrangements avec un dépositaire et un courtier principal.
Information continue
Les OPC alternatifs seront assujettis aux mêmes exigences d’information continue que les OPC classiques et les autres fonds d’investissement dont les titres sont placés au moyen d’un prospectus. Ces exigences ont notamment trait à la préparation et à la remise d’états financiers annuels audités et semestriels non audités, de rapports de gestion, de notices annuelles et de la déclaration en temps opportun de changements importants (déclarations de changement important).
Capital de démarrage et frais de constitution
Les OPC alternatifs devront disposer d’un capital de démarrage d’au moins 150 000 $, soit le même montant exigé des OPC classiques. L’investissement en capital de démarrage peut être racheté lorsque l’OPC alternatif a recueilli des souscriptions d’au moins 500 000 $ d’investisseurs externes. Cette exigence diffère de celle qui s’appliquait auparavant aux fonds marché à terme. Dans leur cas, le gestionnaire était tenu de maintenir un capital de démarrage d’au moins 50 000 $ pour la durée du fonds.
Les gestionnaires d’OPC alternatifs n’auront pas le droit d’être remboursés par le fonds des frais de constitution engagés pour l’établissement du fonds et la préparation des documents d’information initiaux (comme c’est le cas actuellement pour les OPC classiques). Par contraste, les gestionnaires de fonds d’investissement à capital fixe et de FNB qui ne procèdent pas au placement permanent de leurs titres pourront transférer à la charge des fonds les frais de constitution.
Si les titres d’un OPC alternatif sont placés au Québec, le fonds assumera des frais supplémentaires liés à la traduction en français des documents de placement.
Restrictions relatives aux commissions de vente et pratiques commerciales
Les OPC alternatifs seront assujettis à la Norme canadienne sur les pratiques commerciales des organismes de placement collectif (au Québec, le Règlement 81-105 sur les pratiques commerciales des organismes de placement collectif, le « Règlement 81‑105 »). Entre autres restrictions, les commissions de vente ne peuvent être imputées au fonds et doivent être versées par le gestionnaire.
Approbation des changements fondamentaux par les porteurs et les autorités de réglementation
Les règles actuelles qui s’appliquent à tous les fonds d’investissement en matière de changements fondamentaux (événements qui nécessitent l’approbation des porteurs) s’appliqueront également aux OPC alternatifs. Les modifications qui nécessitent l’approbation des porteurs sont notamment un changement du mode de calcul des frais, les hausses de frais, une modification des objectifs de placement fondamentaux du fonds ou une réorganisation. De plus, les frais associés à une réorganisation ne peuvent être à la charge du fonds.
En outre, l’approbation des autorités de réglementation doit être obtenue en cas de changement du gestionnaire d’un OPC alternatif (sauf s’il est remplacé par un membre de son groupe) ou de changement de contrôle du gestionnaire.
Période de transition
Les règles définitives prendront effet le 3 janvier 2019. Les ACVM ont déjà accordé aux fonds marché à terme existants une période de transition expirant le 4 juillet 2019 pour leur permettre d’apporter les changements opérationnels nécessaires pour s’y conformer. Les fonds d’investissement à capital fixe existants seront par ailleurs dispensés de certaines restrictions en matière de placement prévues par les règles définitives, sous réserve de certaines conditions.
Transformation volontaire en un OPC alternatif
Contrairement à un fonds marché à terme, qui sera renommé « OPC alternatif » dans les règles définitives, un fonds d’investissement à capital fixe existant peut choisir de devenir un OPC alternatif. Cependant, cette transformation peut comporter des difficultés pratiques, dont les suivantes : (i) la tenue d’une assemblée des porteurs de parts ou d’actions pour l’obtention de leur approbation, car la transformation constituera probablement une modification des objectifs de placement fondamentaux ou des restrictions sur les placements du fonds; (ii) une modification des documents constitutifs du fonds; et (iii) une modification des arrangements en matière de garde de l’actif et des fonctions de dépositaire (s’il y a lieu). Les OPC classiques existants peuvent aussi choisir de devenir des OPC alternatifs, auquel cas ils seraient aux prises avec des difficultés analogues.
Limites des règles définitives
Bien que les règles définitives diversifient considérablement les stratégies qui peuvent être offertes aux investisseurs individuels, certaines d’entre elles ne sont toujours pas permises. Par exemple, la limite relative aux ventes à découvert (50 % de la VL) ne permet pas la mise en œuvre d’une stratégie pure et intégrale de positions acheteur et vendeur neutres en regard du marché. De plus, la limite totale relative à l’effet de levier (300 % de la VL) peut restreindre certaines stratégies fondées sur les contrats à terme gérés.
Occasions de croissance
Les règles définitives créeront pour les gestionnaires de fonds alternatifs canadiens de belles occasions de faire croître leur entreprise. Depuis bon nombre d’années, les règles sur les OPC en Europe et aux États-Unis sont plus souples que celles du Canada. En vertu des règles définitives, les gestionnaires canadiens pourront offrir une vaste gamme de stratégies de placements alternatifs aux investisseurs individuels, et ces derniers auront accès à une nouvelle série de produits de placement susceptibles de les aider à atteindre leurs objectifs financiers.
Si vous avez des questions sur les règles définitives, notamment sur le lancement d’un OPC alternatif, un membre du groupe Fonds d’investissement et gestion d’actif de TRC-Sadovod sera heureux d’y répondre et de vous être utile.
par Michael Burns, Leila Rafi, Shahen Mirakian, Jason Chertin, Margaret McNee, Alex Bruvels et Jeff Gebert
[1] La Directive de 2009 concernant les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (un texte réglementaire de la Commission européenne qui instaure un régime européen harmonisé à l’égard de la gestion d’organismes de placement collectif et de la vente de leurs titres).
[2] La loi des États‑Unis intitulée Investment Company Act of 1940.
[3] Le paragraphe 2 de l’article 2.1 du Règlement 81-102 indique que la limite de concentration de 20 % ne s’applique pas à l’acquisition a) d’un titre d’État; b) d’un titre émis par une chambre de compensation; c) d’un titre émis par un fonds d’investissement si l’acquisition est effectuée conformément à l’article 2.5 du Règlement 81-102; d) d’un titre d’un OPC qui constitue une part indicielle; et e) un titre de capitaux propres qu’un fonds d’investissement à capital fixe achète conformément à ses objectifs de placement.
[4] Par « actif non liquide » on entend a) tout actif du portefeuille dont on ne peut disposer aisément sur un marché où les cours, établis par cotations publiques d’usage commun, sont largement diffusés, pour une somme qui, à tout le moins, se rapproche du montant de son évaluation utilisé pour calculer la valeur liquidative par titre de l’OPC ou b) un titre de négociation restreinte détenu par un fonds d’investissement. Par « titre de négociation restreinte » on entend tout titre dont la revente fait l’objet de restrictions ou de limitations, par l’effet d’une déclaration, d’un engagement ou d’un contrat du fonds d’investissement ou de son auteur, ou par l’effet de la loi, à l’exception des dérivés visés.
[5] Les modifications apportées à l’article 5.2 du Règlement 81‑107 inscrivent cette exigence dans la réglementation.
[6] Fonds négociés en bourse (« FNB »).
[7] Les fonds alternatifs inscrits en bourse devront utiliser un prospectus ordinaire et l’aperçu du FNB.
Mise en garde
Le contenu du présent document fournit un aperçu de la question, qui ne saurait en aucun cas être interprété comme des conseils juridiques. Le lecteur ne doit pas se fonder uniquement sur ce document pour prendre une décision, mais devrait plutôt consulter ses propres conseillers juridiques.
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